Association Sportive Musulmane Oran

Mohamed BEKHIRA

MOHAMED BEKHIRA (ex DEFENSEUR ASMO ET EN ANNEES 70 ET 80)

MOHAMED BEKHIRA : BON SANG NE SAURAIT MENTIR

Par Mohamed BENZAOUI

 

Mohamed BEKHIRA fait partie d’une grande famille de sportifs et de footballeurs qui depuis plusieurs générations se sont illustrés. A commencer par son oncle Hadj HADEFI  qui   fit signer à l’ASMoran , son père Kadri où il évolua vers la fin des années 40 et le début des années 50 en compagnie de Kada LECHAR, Hadj Mohamed BOUKERCHE, SAFA, GUENDOUZ , BOUHADJAR,BEDDIAR, BIZIZI, BAGHDAD avant de finir sa carrière au Najah des SERRADJ, BOUMAHRAT ,Kaddour KESSACI , MUSTAPHA BABALOU LASNI... Son oncle Hamadi MEDJAHED et ses enfants Kouider, Beka, Senouci se mirent aussi en évidence avec différents clubs comme La Marsa, l’ASMO le MCO, l’USMO, la JSSL.

Mais c’est au MCO qu’il signera sa première licence en intégrant directement la catégorie cadette en 1972 toujours à l’instigation de Hadj HADEFI. Dans ce club il ne restera que le temps d’une saison avant de rejoindre le rival et voisin de l’ASMoran. C’est en 1974 à 17 ans à peine que Mohamed fera ses débuts en équipe fanion aux côtés des BELKAID, BELKHATER, BOUHIZEB Mokhtar, BENMOKHTAR, BENDIDA, MAAMAR HAMOU, ZINE.

Libéro de talent, athlétique, élancé et bien bâti BEKHIRA avait pour modèle l’inégalable et inoubliable Miloud HADEFI. Il réussit à s’imposer malgré la concurrence assez rude à cette époque et fera partie de toutes les sélections jusqu’a être appelé en équipe A par le trio ROGOV SAADANE MAOUCHE en 1981. Malheureusement une hernie discale qui le contraignit à subir une intervention chirurgicale l’empêchera de faire partie du groupe qui allait se qualifier pour la Coupe du Monde de 1982. Il disputera 20 rencontres avec les « Verts » jusqu’en 1983 date de sa dernière cape face à l’EGTPTE lors des éliminatoires des jeux olympiques de Los Angeles.

Apres 10 années passées avec l’ASMO il fera ses dernières saisons avec l’ESMostganem drivée par HENKOUCHE et BENDOUKHA ,et le GCM avant de raccrocher en 1987 à l’âge de 30 ans.

Il reviendra à l’ASMO mais pour entrainer les différentes équipes de jeunes avec lesquelles il s’illustra en Coupe d’Algérie. En 1992 il dirigera l’équipe fanion en incorporant pratiquement tous les jeunes passés sous sa coupe.

Puis Mohamed s’essayera au métier d’entraineur avec plus ou moins de bonheur dans différents clubs du pays.

Actuellement après avoir entamé la saison avec la Saoura, l’IRBSougueur   il suit un stage pour le passage de l’examen d’éducateur de 3° degré. C’est près du café El Najah fief des « Asémistes » où il aime se retremper dans sa bonne ambiance que je l’ai rencontré et que nous avons abordé durant un moment l’actualité du football.

J’AI DES REGRETS ET J’AI ETE DECU

90 minutes : Mohamed, selon l’expression consacrée on va te demander ce qu’il advient de toi.

Mohamed BEKHIRA : Actuellement je suis en stage de formation à Alger pour l’examen de passage du 3°degré d’entraineur. Sinon en début de saison j’ai entrainé l’équipe de la Saoura puis ensuite j’ai atterri à Sougueur avant de me retirer. Il faut dire que c’est surtout l’éloignement et le fait d’être seul coupé de ma famille ajouté à la fatigue due aux incessants vas- et vient qui m’ont un peu poussé à prendre du recul.

90 minutes : tu es donc resté dans le milieu du football depuis ta retraite sportive.

Mohamed BEKHIRA : En effet c’est un milieu que je n’ai pas quitté depuis que j’ai raccroché les crampons en 1987. Je suis passé comme entraineur au sein des jeunes catégories et depuis j’ai gravi les échelons pour entrainer différentes équipes fanions.

90 minutes : avec 20 sélections en équipe nationale et plus de 15 années passées à jouer tu ne sembles pas très satisfait de ton parcours et tu parais nourrir quelques regrets.

Mohamed BEKHIRA : C’est un peu normal car je suis arrivé au football pratiquement avec la réforme sportive de 1977. Au départ malgré le fait que j’étais sélectionné en équipes cadette juniors et seniors j’ai connu des difficultés. J’ai failli quitter l’ASMO qui était parrainé par la SNIC et si je suis resté c’est grâce à Kaddour BEKHLOUFI et DALLA Nourredine (Tamango) qui m’ont soutenu et encouragé. La concurrence faisait rage et on ne prenait pas toujours les meilleurs. De plus j’étais jeune et manquais d’expérience comme beaucoup de joueurs de ma génération. La reforme on y a cru et on pensait que nous allions être sécurisés sur le plan social. Hors cela a été le contraire. Une fois atteint par la limite d’âge on s’est complètement désintéressés de nous. On jouait avec conscience et sérieux. On défendait nos couleurs avec foi et on se contentait de notre salaire (le mien tait de 1520, 00 dinars) ou de nos primes qui atteignaient 300,00 DA dans le meilleur des cas. On était soumis à une réglementation sévère qui nous empêchait de signer ailleurs. On n’avait pas le choix vraiment. De plus j’ai eu des coups d’arrêt dus à des ennuis physiques. Ce qui fait qu’a 27 ans international en titre je me suis retrouvé en deuxième division. Et puis quelques temps après ce fut la fin de la reforme et le retour des clubs au statut antérieur. Je ne sais pas si je garde des souvenirs impérissables de ma carrière car mis à part les deux finales de coupe en 1981 et 1983 je dois avouer que je n’ai pas l’image de moments exaltants.

90 minutes : tu sembles un peu amer et désabusé Mohamed.

Mohamed BEKHIRA : C’est normal car les gens ne savent pas que j’ai galéré. Pourquoi me diras –tu ? Dès le désengagement de l’Etat nous avons été livrés à nous-mêmes. Personne ne s’est occupé de notre devenir. On a fait le choix du football pensant que notre situation sociale serait assurée. Or c’est le contraire qui s’est produit. Au bout du compte on a lâché la proie pour l’ombre. On n’avait pas de formation professionnelle adéquate et on ne s’est pas occupé de notre reconversion comme cela se fait dans les grands clubs. Il fallait nous débattre seuls alors que nous avions des responsabilités familiales. Finalement on avait des devoirs mais nos droits on les a abandonnés. On n’a jamais négocié le port du maillot national ou de notre club. C’était un devoir national et citoyen, une fierté et un honneur.

90 minutes : Les temps ont bien changé depuis.

Mohamed BEKHIRA : Cette génération a une autre mentalité. Les joueurs actuellement savent que faire le choix du football c’est aussi s’assurer son quotidien. Ils on été instruits par ce qui a pu arriver a leurs ainés. Je vois bien que l’argent coule à flot dans le milieu. Une carrière est courte et très aléatoire et on passe facilement de la gloire à l’anonymat. Au moins faire en sorte que l’on soit à l’abri du besoin et digne.  Car le football est ingrat.

90 minutes : Le rendement n’est pourtant plus du tout le même.

Mohamed BEKHIRA : C’est le niveau d’ensemble de notre football qui a bien régressé. Les joueurs sont de plus en plus rares aussi bien sur le plan qualitatif que quantitatif. On ne possède plus de HADEFI, LALMAS ,FREHA ,SALHI, SERIDI, MADJER ,KACI SAID ,BELLOUMI, ADJISSA,BOUSRI, GUEDIOURA, BENSAOULA, MEZIANI ,YAHI ,BENBOUTELDJA ,pour n’en citer que quelque uns .On a complètement décaissé la formation et les écoles. A notre époque il y avait beaucoup moins de moyens mis a notre disposition qu’actuellement. Mais il y avait en nous cette rage de vaincre d’exprimer notre talent. On se sacrifiait vraiment et sur le terrain on se donnait avec cœur et cran. La différence fondamentale réside dans le fait que les générations successives ont évolué à des époques distinctes. Les conditions sociales et le contexte socio-économiques étaient autres.

M.ZEROUATI EST UN GRAND DIRIGEANT

Le 30 juin sera une date butoir et un tournant dans l’histoire du football algérien qui doit se professionnaliser. On peut en parler ?

Mohamed BEKHIRA : Là tu évoque un sujet sensible. D’abord il faudrait que le joueur ait cette mentalité de professionnel qui fait qu’il se comporte en tant que tel. Avec ses obligations et ses exigences. De plus a-t-on les responsables aptes à gérer des entités pareilles ? Cela doit passer par des formations de dirigeants des séminaires comme cela se fait au sein des entreprises. On doit en finir avec le bénévolat. Le dirigeant doit connaitre non pas l’ABC du football uniquement mais aussi la manière dont doit être administré un club. On aurait du penser a ca avant de mettre la charrue avant les bœufs. Il ne faut pas passer sans transition d’un système à un autre. Un seul club semble être prêt à relever le défi à mon humble avis : l’Entente de Sétif avec SERRAR. Et la JSSaoura que j’ai entrainée a un grand président en l’occurrence M. ZEROUATI Hmimo qui connait son affaire qui sait manœuvrer et commander. Un président qui est dévoué, intègre honnête, et connait bien le football. Le peu de temps passé avec lui était vraiment pur bonheur : un plaisir que de travailler à ses côtes. Cette région a un bel avenir footballistique devant elle à condition qu’il reste le temps qu’il faut.

90 minutes : on en vient aux choix de SAADANE et à l’Equipe Nationale si tu désires évidemment donner ton opinion.

Mohamed BEKHIRA : il y a beaucoup de personnes qui prétendent que l’Equipe Nationale actuelle est plus forte que celles de 82 ou de 86. On ne va pas établir de comparaison qui n’a pas lieu d’être. Elle n’a qu’un seul point commun par contre. Elle est animée du même élan et de la même ferveur que celle qui a habitée son ainée. Comme en 1982, et après l’union sacrée s’est faite autour d’elle. Durant dix ans les gens les jeunes ne portaient que les tricots du Barca ou de Manchester. La tu vois l’engouement qu’elle suscite. Car la jeunesse a été sevrée, privée de joie durant un quart de siècle. Là est le mérite de SAADANE. Pour ma part je suis mal placé pour porter un jugement quelconque sur ses choix et ses options. Je ne suis pas l’entraineur de l’équipe nationale. Je constate sur pièces qu’il a réussi jusqu’ a présent et qu’il a assumé ses décisions. Il est responsable et il le sera. C’est malsain de dénigrer quelqu’un avant même de lui avoir donné la chance de mener a bien sa mission. A ceux qui le critiquent je dirais seulement « feriez vous mieux à sa place ? »

90 minutes : Mohamed je pense que pour conclure tu as un message à transmettre.

Mohamed BEKHIRA : oui ce message ira droit aux joueurs actuels de toutes les divisons et catégories confondues. C’est quand je suis passé de l’autre côté de la barrière et que j’ai eu à m’occuper de clubs que j’ai compris beaucoup de choses. Une carrière est très aléatoire et on peut être à la merci de n’importe quoi ou n’importe qui. Tout footballeur a des rêves de grandeur et veut arriver au sommet. On ne peut y arriver que par le travail et le sérieux. Les exemples ne manquent pas mais à l’inverse on peut rapidement devenir une icône, une star adulée et retomber dans l’anonymat et dans la déchéance beaucoup plus vite que l’on ne le croit. Il suffit de penser à Georges BEST et GARRINCHA qui ne sont que la partie émergée de l’iceberg pour en être convaincu. Et quand vient cet instant il ne se trouvera plus beaucoup de gens qui se retourneront sur votre passage…. Voila pourquoi je dirais à tous ces milliers de jeunes algériens qui veulent percer et devenir des héros : « oui vous pouvez le faire ; mais sans l’abnégation, l’honnêteté et le respect vis à vis de vos ainés et des foules qui vous acclament vous ne pourrez pas réussir. » Pour finir je dois quand même rendre hommage à M. RAOUAROUA qui nous a réconcilié avec le football et a fait renaitre en nous l’espoir que demain sera meilleur. Si notre sport roi revient dans le giron des grands il le lui doit en grande partie, pour avoir su et pu en si peu de temps redoré un blason terni par des années de disette.



25/05/2011
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